La Cité industrielle de Tony Garnier (1917)
revisitée par Hellé
et Carlègle (1918)
Publié sous forme d'album en 1917, "Une Cité
industrielle, Etude pour la construction des villes" est l'oeuvre
fondatrice de l'architecte Tony Garnier (1869-1948), basée sur la vision
globale et hygiéniste de l'aménagement des villes. Ce premier manifeste de
l'urbanisme du XXe siècle organise la cité selon les besoins de l'homme à
l'ère industrielle et y inscrit les quatre fonctions primordiales de la ville
contemporaine: "Habiter, circuler, travailler, se distraire"... Un
projet utopique, jamais réalisé, dont on peut cependant admirer la maquette à
l'échelle 1/5000, à la Cité de l'architecture à Paris (voir en ligne ici), et qui a influencé tout le XXe siècle.
Photo librairie Le Feu follet
Dès l'année suivante en 1918, André Hellé et Carlègle
- peut-être enthousiasmés par le programme précurseur de Garnier -, décident de
le matérialiser sous forme de jouets lilliputiens, à destination exclusive des
Grands Magasins du Printemps. Leur cité industrielle comprendra 78 pièces dans
sa formule complète, depuis les hauts-fourneaux de l'usine métallurgique jusqu'aux maisons
ouvrières individuelles, en passant par les quartiers de la gare et de l'école
primaire. Comme la plupart de ces jouets en bois à l'apparence modeste, celui-ci a disparu, on ne le connaît que par sa représentation dans les catalogue du Printemps.
La cité moderne à l'usage des enfants n'a en apparence rien d'avant-gardiste ou d'utopique. Elle porte un nom imaginaire, "Moufry", qui évoque la France profonde. Mais, singulièrement, comme chez Garnier, cette ville ne comprend pas d'église...
Si nous nous étonnons qu'un tel jouet ait pu apparaître en
1918, dans un catalogue d'étrennes où prédominaient encore les jouets guerriers
et les uniformes de soldats alliés taillés à hauteur d'enfant, nous voulons
imaginer que les deux créateurs souhaitaient se distinguer des
"va-t-en-guerre" du monde du jouet, pour proposer une vision
futuriste de la cité, "où chacun se rendrait compte que le travail est la
loi humaine et qu’il y a assez d’idéal dans le culte de la beauté et la
bienveillance pour rendre la vie splendide".
B.M.